Fédéric Mabileau sur les terres de Saint Nicolas de Bourgueil
C’est quasiment à mi distance à vol d’oiseau entre Saumur et Langeais que se situe la commune de Saint Nicolas de Bourgueil, à l’ouest de Bourgueil. L’aire est située en majorité sur une large terrasse d’alluvions anciennes dont les sols profonds sont constitués de sables et de graviers. Au dessus des terrasses, le tiers du vignoble s’étend sur un coteau de tuffeau (craie du Turonien) recouvert de sables.
« Faire du vin de garde, n’est pas chose aisée dans ce périmètre. Les sols de sables et de graviers rendent la culture de la vigne délicate, car ce sont des sols fragiles qui ne supportent pas la sécheresse. »
Frédéric Mabileau représente la quatrième génération de vigneron
C’est lui que nous vous proposons de découvrir ce mois-ci. « Mon arrière grand père avait 2 hectares en culture, mon grand père a développé la polyculture, et mon père s’est spécialisé dans la viticulture. En 1991, quand j’ai décidé de devenir vigneron à mon tour, j’ai acheté 2 ha de vignes et j’ai repris des vignes en location. »
« En 1993, je crée l’étiquette avec le logo aux deux têtes, symbole de l’harmonie, de la convivialité : les deux personnages regardent dans la même direction. Vous noterez que le nez, les yeux et la bouche sont les organes de la dégustation. Ces deux hommes peuvent représenter le père et le fils, qui se transmettent la terre, mais aussi des consommateurs heureux en pleine empathie, après la consommation de mes vins, je l’espère !»
«Quand en 2003, mon père a décidé d’arrêter le travail, nous avons fusionné les deux propriétés, et je me retrouve à présent avec 28 ha de vignes, dont 22 ha en St Nicolas, 1 ha en Bourgueil et depuis peu 2 ha en Saumur blanc et 2 ha en Anjou. Nous sommes 7 personnes à travailler sur le domaine ».
«Spécialisé dans le rouge, j’avais envie de m’essayer sur le blanc, et j’ai racheté il y a deux années déjà, des vignes en Saumur Blanc et en Anjou. Vinifier le chenin est une nouvelle frontière pour mes équipes et moi-même : nous avons déjà deux cuvées, le Chenin Blanc en Saumur et le Chenin des Rouillères en Anjou».
Frédéric Mabileau et son épouse, chargée du commercial, sont spécialistes du Cabernet Franc.
Ce cépage constitue 90% de son domaine. En 2007, il introduit la culture biologique dans son domaine.
«La culture biologique est une évidence pour nous. J’ai d’abord introduit ces méthodes sur les sols plats, puis sur les sols de coteaux. Nous sommes 4 sur plus d’une centaine de producteurs à pratiquer ce type de culture dans l’appellation (1 100 ha). Il me faudra 5 années au total pour convertir l’ensemble des vignes. Le résultat est réel : le système foliaire a changé de couleur, les vignes se défendent progressivement mieux contre les maladies, et le système racinaire s’est développé.»
« Coté vinification, le changement est réel : je trouve des cuvées plus simples et plus droites au niveau fermentaire. Et lors de l’élevage, mes vins sont plus stables et ne nécessitent pas autant de sulfites qu’autrefois ! ».
« Sur le plan de la dégustation, on observe une différence : les vins sont à la fois plus acides et plus tanniques, minéral, tendus et profonds. Ils dégagent une amertume, une salinité et sont finalement plus désaltérant : j’aime ces vins. Ils sont l’expression de mon terroir – ils sont ligériens » nous explique Frédéric Mabileau lors de la dégustation.
« Bien sûr, la conduite en bio demande une extrême vigilance. Nous devons être très réactifs pour traiter immédiatement la plante dès qu’un début de maladie s’installe. Cela demande une grande présence dans la vigne, mais au fond, c’est bien là que se fait la différence. »
Thierry Goddet